Régime matrimonial et achat immobilier : gare aux pièges !

Régime matrimonial et achat immobilier : gare aux pièges !

Lorsqu’on est en couple, acheter un logement à deux peut sembler un pas naturel à franchir. Mais l’importance des sommes en jeu doit inciter à réfléchir à son régime matrimonial notamment en cas de séparation ou de décès.

Acheter en couple, sans être marié ou pacsé, voilà un cas de figure qui nécessite des conseils particuliers de son notaire. En effet, être en concubinage est une situation très peu protectrice en cas de séparation du couple ou de décès.

L’union libre : des précautions s’imposent

Acheter à deux sans formaliser l’union nécessite des précautions à commencer par le fait de faire figurer les deux noms sur l’acte de vente pour que chacun ait un droit sur le logement. Si l’un des membres du couple apporte des fonds sans figurer sur l’acte de vente, il est considéré comme créancier ou donateur, ce qui a des conséquences fiscales non négligeables. Pour les personnes qui veulent néanmoins acheter à deux sans formaliser leur union, plusieurs solutions sont possibles, comme un achat en indivision. Dans ce cas, la propriété du logement est partagée à hauteur de la contribution financière de chacun lors de l’achat. Le concubin qui apporte la moitié de la somme est propriétaire à hauteur par exemple de 50 %, mais cela peut être 70 % ou plus. Si les contributions de chacun ne sont précisées dans le contrat de vente, l’indivision sera considérée comme à parts égales. Le risque dans l’indivision est que l’un des membres du couple assume la plupart des dépenses de la vie courante comme des petits travaux, alors que sa part dans l’indivision reste inchangée. A la revente, il serait donc perdant. Il est ainsi plus prudent de signer, devant notaire, une convention qui permet d’indiquer les participations financières de chacun au fonctionnement de l’indivision mais aussi de protéger les concubins en cas de décès ou de séparation. Dans ce dernier cas, si les deux membres de l’indivision sont d’accord pour vendre le logement, le prix est partagé en fonction des parts respectives. Et en cas de décès de l’un des concubins, ce sont les héritiers du défunt qui deviennent propriétaire de sa part dans l’indivision alors que le survivant n’a u-aucun droit sur l’héritage. S’il en est héritier par testament, il doit s’attendre à payer des droits de succession élevés : ils se situent au taux maximum de 60 %.

Une SCI : une possibilité plus complexe

Autre possibilité : constituer une Société civile immobilière (SCI) pour acheter en commun. C’est la SCI qi achète et devient propriétaire. Les parts professionnelles sont proportionnelles aux apports effectifs et chacun est responsables des dettes de la SCI en fonction de sa quote-part.

Le couple peut occuper le logement en tant que locataire de la SCI ou en être occupant à titre gratuit.

Une SCI implique cependant de tenir des assemblées générales et une comptabilité régulière. De plus, la création d’une SCI nécessite des statuts dont il faut confier la rédaction à un professionnel comme un notaire. En cas de séparation, celui qui veut se retirer peut demander qu’on lui rachète ses parts. Mais il faut que l’associé restant en ait les moyens. Sinon, il faut tout vendre et, dans ce cas, voter la dissolution de la SCI et vendre d’un commun accord avant de se partager les fonds obtenus. En cas de désaccord, il faut saisir le tribunal, qui peut obtenir la dissolution de la SCI.

En cas de décès de l’un des associés, les statuts de la SCI peuvent prévoir que la société sera dissoute ou continuera avec le seul associé survivant. Celui-ci pourra racheter la valeur de leurs parts aux héritiers sans qu’ils puissent s’y opposer. Mais, comme en cas de séparation, cela implique que l’associé survivant ait les moyens de racheter au prix du marché. De plus, cela nécessite que les statuts soient prévus pour cela en amont.

Acheter à deux en étant pacsés

Il est également possible de se pacser pour acquérir à deux : dans ce cas, il est préférable de choisir le régime de séparation du patrimoine plutôt qu’un régime d’indivision. En l’absence de précision dans la convention de Pacs, le régime applicable est celui de la séparation. Autrement dit, chacun des partenaires est seul propriétaire des biens qu’il acquiert pendant le Pacs. Si vous achetez ensemble, il s’agit d’une indivision, et, dans ce cas, les partenaires doivent indiquer dans l’acte d’achat les sommes engagées par chacun d’eux. En l’absence de cette mention, les deux partenaires sont réputés être propriétaires à hauteur de 50 %. Il est possible de prévoir une convention d’indivision qui détermine les modalités de gestion de cette dernière. Et les deux partenaires sont solidaires pour les dépenses non excessives de la vie courante comme les abonnements divers, les primes d’assurance ou encore les charges de copropriété. Cette solidarité ne cesse qu’en cas de dénonciation ou d’extinction du Pacs.

En cas de séparation, il n’est pas possible de vendre le logement sans l’accord de l’autre, et, en cas de vente, chacun récupère sa part.

La convention d’indivision peut gérer les cas de. Séparation et de décès. En l’absence de convention, le partenaire de Pacs survivant n’a aucun droit sur les biens. Les héritiers deviennent propriétaires de sa part. Le survivant se trouvera donc en indivision avec les héritiers même si, pendant l’année qui suit, il peut rester gratuitement dans le logement. Pour éviter cette situation, le mieux est de prévoir un testament afin de transmettre l’usufruit au partenaire dès que le Pacs est signé. Le testament permet également d’insérer une clause de rachat préférentiel du partenaire de Pacs.

Le mariage : cadre le plus protecteur  

Le plus simple pour acheter à deux est d’être mariés. Si vous n’avez pas signé de contrat de mariage, c’est le régime légal qui s’applique. C’est-à-dire que tous les biens acquis après le mariage sont communs, indépendamment du mode de financement. Les biens immobiliers appartiennent aux époux à parts égales, même si la participation des deux est inégale. Dans le cas d’une séparation, le bien pet être vendu et le produit de la vente partagé en deux. Ou bien il peut être racheté par l’un des deux conjoints. En cas de décès, le conjoint est un héritier direct qui dispose de plus de possibilités pour rester dans le logement. Il peut notamment choisir de rester usufruitier.

S’il y a un contrat de mariage, ce document règle le sort des différent biens achetés après le mariage. Il peut s’agir d’une séparation de biens : dans ce cas, vos patrimoines restent séparés et, si vous achetez ensemble, c’est le régime de l’indivision qui s’applique. Il peut s’agir d’une communauté d’acquêts aménagée qui offrent, par exemple, des possibilités de rachat par l’un ou l’autre des membres du couple selon les règles établies à l’avance. Lors d’une séparation, le prix de vente sera redistribué en fonction de ce qui est prévu au contrat. Lors d’un décès, l’époux survivant bénéficie d’un droit temporaire au logement d’un an.[i]  

Emprunt : le mariage plus favorable pour constituer son dossier

Pour acheter, en général, il faut d’abord emprunter. Les taux élevés et les difficultés d’accès au crédit actuelles incitent les banques à regarder attentivement le régime matrimonial des emprunteurs.

  • Les banquiers préfèrent les couples mariés où la solidarité joue entre les époux, ce qui sécurise le remboursement de la mensualité.
  • Si vous êtes en union libre, le banquier va apprécier vos revenus séparément et non globalement comme il le ferait si vous étiez mariés. Il se peut que, de ce fait, vous obteniez un crédit d’un montant inférieur ou que l’un des membres du couple n’obtienne pas son crédit.
  • Dans un Pacs, la banque exigera souvent que vous empruntiez à deux, même si vos biens ne sont pas mis en commun. Et, dans ce cas, chacun d’entre vous est totalement engagé vis-à-vis de l’établissement de crédit pour le montant total du prêt.

[i] Source : Conseil des Notaire n°489 trimestriel octobre-novembre-décembre 2023